Ce sont deux petites entreprises, installées à Mennecy (Essonne) et à Lyon, mais elles ont bénéficié, ces derniers mois, d’une grande attention de la part des ministères de l’économie et des armées. Et pour cause : Segault (80 salariés) et Velan SAS (280 salariés) fournissent les robinetteries des chaufferies des sous-marins nucléaires de Naval Group et des centrales nucléaires d’EDF.
Bercy a annoncé, vendredi 6 octobre, que ces PME intégrées à la société de droit canadien Velan, en cours de rachat par le texan Flowserve Corporation, ne passeraient pas sous pavillon américain. Informée quelques heures plus tôt du veto français, la société d’Irving (Texas) a décidé d’abandonner les négociations avec Velan, dont la famille actionnaire a désormais deux options : conserver les deux filiales ou les vendre, mais à un acheteur français.
Segault était sous le coup de la « procédure de contrôle des investissements étrangers ». Une démarche automatique quand un industriel ou un financier non européen veut acquérir au moins 10 % des droits de vote d’une société française cotée (ou 25 % des droits de vote d’une société non cotée) travaillant dans un secteur stratégique. Or, le gouvernement a jugé que les engagements pris par la multinationale Flowserve n’étaient pas suffisants pour éliminer tous les risques.
Le contrôle des investissements étrangers renforcé
L’affaire avait pris un tour politique, surtout à droite et à l’extrême droite. En mai, en réponse à la question d’un député du Rassemblement national, le ministre des armées, Sébastien Lecornu, avait prévenu que l’Etat s’opposerait à « une perte de contrôle opérationnel » de l’entreprise. Deux mois auparavant, Arnaud Montebourg, ancien ministre du redressement productif (2012-2014) lors du quinquennat de François Hollande, avait écrit au ministre de l’économie, Bruno Le Maire, pour réclamer le maintien de la PME dans le giron français.
L’Etat et les entreprises de la base industrielle et technologique de défense savent qu’il est risqué d’avoir des fournisseurs américains. Washington peut réclamer des informations à une entreprise américaine ou à ses filiales étrangères sans autorisation judiciaire. Le dispositif ITAR (International Traffic in Arms Regulations) encadre les exportations de matériels militaires incorporant des composants, des sous-ensembles ou des logiciels d’origine ou sous licence américaine. Par ailleurs, le département de l’énergie peut imposer sa réglementation et freiner l’exportation de technologies nucléaires françaises. Difficile à accepter quand on sait que Velan SAS équipe les 56 réacteurs français d’EDF et les trois quarts des centrales dans le monde.
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