Dans le carnet de guerre de l’Ukraine, la date du mercredi 20 septembre semble tristement ordinaire. Les forces ukrainiennes ont abattu une poignée de drones russes. Trois villages ont été bombardés. Mais tandis que le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, s’exprimait pour la première fois devant le Conseil de sécurité des Nations unies, à New York, trente-deux pays, à La Haye, ont plaidé au côté de la partie ukrainienne devant la Cour internationale de justice (CIJ) contre la Russie.
Pour cette session, ouverte le 18 septembre, il n’est pas encore question du fond de l’histoire. Les avocats débattent de la compétence de la plus haute cour de l’ONU, chargée de régler les différends entre Etats. Moscou demande en effet aux quinze juges de rejeter la plainte déposée par Kiev quelques heures après l’invasion du 24 février 2022, dans laquelle l’Ukraine accuse la Russie, non pas d’avoir commis un génocide, mais d’avoir abusé de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide pour pouvoir justifier sa guerre. En droit international, la guerre n’est pas en soi illégale si elle est lancée pour des motifs acceptables, comme la légitime défense. Autrement, il s’agit d’un crime, d’une agression d’un Etat contre un autre.
Un supposé génocide
En février 2022, quelques heures avant l’entrée des chars russes en Ukraine, Vladimir Poutine avait ainsi justifié son « opération militaire spéciale » par le souci de mettre fin à un supposé génocide en cours dans le Donbass, à l’est de l’Ukraine, fomenté par les forces ukrainiennes contre la population pro-Russe. Un « abus » dénoncé par Kiev.
Dix-neuf mois et une plainte plus tard, les avocats de la Russie, assurent en substance que le mot « génocide », brandi par Vladimir Poutine, n’aurait été que simple rhétorique. Selon l’ambassadeur Guennadi Kouzmine, représentant le ministère des affaires étrangères russe, Moscou aurait agi en légitime défense, comme le prévoit l’article 51 de la Charte des Nations unies, et non pas en vertu de la Convention sur le génocide.
Mensonges, a répliqué Anton Korynevytch, l’ambassadeur de l’Ukraine sur la justice internationale. « Pendant neuf ans [depuis le début de la guerre dans le Donbass en 2014], nous avons enduré des mensonges sur le génocide venant du plus haut niveau du gouvernement russe, a-t-il asséné. Et depuis un an et demi, nous souffrons de terribles attaques en raison de ces mensonges. Aujourd’hui, l’Ukraine demande simplement à être entendue devant la Cour pour que celle-ci puisse résoudre ce différend. » L’avocat, originaire de Crimée, a aussi dénoncé « la défiance » de Moscou envers la Cour. En mars 2022, les juges avaient ordonné à la Russie de retirer ses troupes d’Ukraine. « Aujourd’hui encore, la Russie fait pleuvoir des missiles sur nos villes et nos populations, toujours au nom de la prévention d’un prétendu génocide », a souligné M. Korynevytch.
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